Home sweet home

J’y suis retournée, encore, comme si de rien n’était. J’y suis retournée comme si j’avais pas la gerbe rien que d’entendre le nom, comme si chaque endroit ne me rappelait pas un truc immonde.

J’y suis retournée, brièvement, et je me suis enfouie dans la maison familiale, seul repère d’amour et de choses positives. J’y suis retournée et j’ai même pris le bus, comme si j’y avais jamais été insultée ou malmenée physiquement.

J’y suis retournée en lui disant « et maintenant tu vas faire quoi ?« , en pensant que j’avais pas du tout envie de croiser des anciens parce que je voulais surtout pas qu’ils se disent que j’habitais encore là, que j’étais encore emprisonnée dans cette horreur de ville, que j’avais un quelconque lien restant avec eux.

Ce lien dégueulasse, sale, nauséabond, j’ai envie de le brûler. Jamais je n’ai pu m’attacher à cette ville malgré la forêt, le centre commercial, les balades en vélo ou les boulangeries pleine de bonbons. Le seul truc qui me fait y revenir en fait, c’est eux.

C’est mon père et ses blagues, ma mère et son regard qui dit je veux prendre soin de toi, mes trois frères et ma soeur. Ma soeur, la plus courageuse et la plus drôle, la plus brillante et la plus gentille. Elle qui a une super enfance et qui ne verra sûrement jamais la ville où elle grandit avec autant de douleur que moi.

Sans eux, je remettrais jamais les pieds dans ce qui a été mon angoisse pendant des années mais pour eux, je serre un peu plus fort les poings et je prends mon courage à deux mains. Le courage, mon bon vieux pote de torture, mon BFF, mon côté Gryffondor qui fait face même la tête sous l’eau.

Cette ville je l’abhorre, je la déteste, elle me répugne. Mais je reviens parce que maintenant je peux l’affronter. Je reviens parce qu’au milieu de ce tas de fumier de souvenirs nuls, de ce cimetière d’enfance, il y a un grand soleil qui irradie tout le voisinage : cette maison familiale et chaleureuse, cette enfant de 7 ans et demi et sa couronne de fleurs, sa paire de rollers et ses petites mains sur mes épaules quand je suis triste.

C’est ça, qui vaut le coup de revenir.